Retour à la «Beat» Generation 2
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Et si Jack Kérouac revenait à New York
Vers le milieu de novembre, Bertrand me proposa de faire un petit voyage à New York pour visiter quelques galeries d'art et parcourir les musées. Il m'assura qu'il payait tout, sachant fort bien que mon revenu d'étudiant ne me permettait pas cette fantaisie. J'hésitais car je ne voulais pas être démesurément en dette avec lui. Pour palier à mes réserves, il m'annonça qu'un autre étudiant nous accompagnerait et que celui-là ne semblait pas aussi préoccupé que moi concernant de lui devoir quelque chose. J'avais donc bien deviné quand je croyais qu'il ne m'était pas très fidèle. Mais, comme je ne voulais pas revivre les souffrances que j'avais déjà endurées au cours de mes relations avec d'autres auparavant, je m'étais juré de ne pas être jaloux et de ne rien bousiller à cause d'une hypothétique infidélité voire d'une infidélité pas hypothétique du tout. Je dormais chez Bertrand tous les mercredis soir et la plupart des samedis soirs. Les autres soirs, que faisait-il donc? Aussi je le voyais souvent entouré de jeunes filles à la cafétéria de l'université. Il ne m'avait pas caché d'ailleurs qu'il était attiré par les deux sexes. En fait, comme on dit au Québec, il était « au cul », peu importait le genre. Cependant, je dois dire que je fus particulièrement étonné quand il m'annonça que notre compagnon de voyage n'était pas une compagne.
Jusque là, j'avais compris que l'on partagerait une chambre ensemble et la fille une autre chambre; ce n'était pas très compromettant. Mais trois gars! Comment allions-nous nous loger? Il me dit qu'une chambre à deux grands lits avait été réservée. « Nous dormirons dans un lit et le garçon dans l'autre », me dit-il en me tapant un clin d'œil. « Il se pourrait peut-être bien que nous finissions tous dans un seul lit » ajouta-t-il en riant.
J'ai ri aussi en lui demandant s'il n'avait pas des plans derrière la tête. « On verra bien » m'a-t-il répondu. « Quand je t'ai connu, qui eut dit qu'on partagerait nos fantasmes sexuels? Et pourtant! »
Je me demandais qui serait mon compagnon de voyage? Il y avait quelques individus dans mon groupe avec lesquels je n'avais aucune envie de voyager. Finalement, il me nomma Claude J. Curieusement, Claude J. n'était pas dans mon groupe. Il était étudiant en Lettres françaises. Je l'avais connu un an auparavant quand j'avais pris quelques cours dans ce département. Il était maintenant l'étudiant de Bertrand car il avait profité de la grande notoriété de ce dernier pour s'inscrire à son cours d'esthétique. C'est comme ça qu'ils s'étaient connus.
Je n'étais pas vraiment surpris d'apprendre que Claude serait du voyage. Il était comme on dit encore au Québec « un téteux de prof » (il tétait les profs), toujours au bureau du prof à la pause ou à la fin du cours, toujours une question, toujours un commentaire, toujours prêt à amorcer une longue discussion sans tenir compte de la présence des autres.
Mis à part le côté très sexé de Claude J., sa présence ne me disait rien de bon. Je le connaissais suffisamment pour savoir qu'il avait dû « quêter » sa place dans ce voyage, collant aux baskets du prof jusqu'à ce que l'invitation s'impose. Je fis part de mes commentaires à Bertrand qui était tout à fait de mon avis.
«Alors pourquoi l'as-tu invité? » lui demandai-je. « Parce que tu m'as dit que tu le trouvais sexy » me dit-il en riant. « Je voulais vous rapprocher ». _ « Trop de bonté! Cher professeur! Mais je me serais bien passer de lui ». _ « Tu verras! Au retour, tu ne voudras peut-être plus te passer de lui » ajouta-t-il en riant franchement.
J'ai capitulé plutôt facilement quand il m'a rappelé que je lui avais déjà mentionné ce fameux Claude J. au cours de nos échanges « olfactifs ». Je lui avais dit que je le trouvais très excitant surtout qu'il semblait porter toujours les mêmes vêtements. Si ce n'eut été qu'ils ne fussent pas froissés, j'aurais cru qu'il dormait sans les quitter.
J'avais aussi ajouté que Claude réveillait mes fantasmes pour les odeurs quand je le voyais entrer en classe avec le même pantalon marron foncé, en velours côtelé, très ajusté. Ce dernier lui moulait les fesses qu'il semblait avoir particulièrement dures et fermes avec une belle forme oblongue. En effet, il était fait sur le long notre Claude. Il était grand et mince, de figure également allongée, des yeux marron et des cheveux assortis dont une mèche revêche lui retombait constamment sur le front. C'était un garçon très intelligent (j'avais pu le constater aux questions qu'il posait durant les cours et lors de la présentation orale de l'un de ses travaux). Il était beau, brillant, sexé, intelligent, mais « chiant ». Il portait de petites bottes de cuir brunes à larges revers ce qui lui permettait d'y enfiler le bas de ses pantalons et de rabattre la bordure de cuir de la botte vers l'extérieur et le bas. On aurait dit des bottes de mousquetaires si elles eussent été plus hautes. Il portait aussi toujours une même chemise beige foncé assortie au pantalon et une veste de daim marron. Comme il portait toujours la même chose, mon imagination a tôt fait d'imaginer les odeurs de son intimité qui devaient se cacher dans le fond de son pantalon de velours sur lequel il était assis à longueur de journée.
Quant à sa chemise, ou ses chemises toutes pareilles, j'aimais mieux penser qu'il n'en avait qu'une seule. Elle devait aussi contenir la sueur de ses aisselles et de son dos. Il était si sexy que tout cela ajoutait à mon excitation. Voilà ce que j'avais raconté un jour à Bertrand quand il m'avait parlé de cet étudiant en lettres françaises qui «tournait» autour de lui constamment. Et voilà les propos qu'il me servait maintenant pour se justifier de l'avoir invité.
Je me demandais s'il n'avait pas eu du sexe avec Claude. Peut-être voulait-il le partager avec moi pour se faire pardonner son infidélité, quoiqu'il n'eût rien à se faire pardonner car je connaissais sa puissance de drague et je l'acceptais tel qu'il était? Peut-être aussi comptait-il sur ce voyage et notre propre relation pour initier Claude à nos jeux? Peut-être encore, sachant que lui-même retournerait en France après Noël, voulait-il me faire un cadeau de remplacement; cela était tout à fait son genre? Peut-être enfin n'était-ce rien de tout cela? Il avait peut-être été simplement incapable de ne pas inviter Claude. J'imaginais facilement que lorsque Bertrand eût parlé à Claude de «notre » projet d'un long week-end à New York, celui-ci avait manifesté un tel enthousiasme et une telle déception de ne pas être du groupe, que Bertrand avait cédé à une impulsion généreuse, ce qui était aussi tout à fait conforme à sa personnalité.
Bref! Il serait là et je devrais composer avec sa présence. Je me demandais s'il allait porter son ensemble marron-beige-brun ou si sa valise nous réservait des surprises. Je me moquais et je faisais rire Bertrand. Je disais : « Je te préviens, s'il dort avec ses vêtements, je les lui arrache et je les lui fait sentir! »
Nous sommes partis un vendredi matin. Bertrand avait loué une voiture. J'ai eu l'impression que, même s'il était au courant de ma présence, Claude ne semblait pas trop enchanté de devoir partager son cher prof avec moi. Il avait peut-être aussi envers moi des ressentiments compréhensibles étant donné qu'il se rendait bien compte de la complicité qui existait entre Bertrand et moi. Il était évident que notre relation avait une longueur d'avance sur celle qu'il entretenait ou plutôt qu'il tentait d'entretenir avec son prof depuis quelque temps. Il y avait une telle aisance entre Bertrand et moi que la grande intelligence de Claude devait sans doute en avoir cherché l'explication. À moins qu'il ne l'eût déjà trouvée après seulement quelques heures de voiture. Je le voyais comme un observateur attentif de chacune de nos blagues, de chacune de nos remarques, de chacun de nos silences et de nos regards parfois chargés de sous-entendus. Un peu avant d'arriver à New York, j'ai interprété l'une des expressions de son visage qui semblait dire, en mettant les mots dans la bouche d'un autre personnage que celui désigné par Molière : « Mais, que diable, suis-je venu faire dans cette galère? » Au premier dîner à New York, Bertrand aborda peu à peu le monde des relations humaines afin de pouvoir, tout naturellement bien sûr, introduire celui de la sexualité afin de pouvoir, tout aussi naturellement bien sûr, aborder celui des fantasmes et il parla alors du Marquis de Sade. Claude était un peu intimidé quand on en venait à faire trop de rapprochements entre les habitudes et les fantasmes des hommes du XX è siècle et ceux du XVIII è où Sade avait vécu. En somme, Bertrand lui faisait presque le même grand jeu qu'il m'avait fait quand il m'avait invité à dîner la première fois chez lui.
Je me demandais, avec humour et admiration, combien de temps il faudrait à notre cher prof pour donner envie à Claude de nous rejoindre dans notre lit. Mais Claude restait prudent. On voyait clairement qu'il n'avait pas envie de paraître « coincé » aux yeux de Bertrand.
Aussi brillant et cultivé en matière de littérature que d'histoire de l'art, Bertrand nous parlait de la Beat Generation. Il racontait qu'Allan Ginsberg était amoureux fou du grand et sexy Jack Kérouac, l'auteur de On the Road. Il nous entretenait longuement de ce roman que Claude connaissait pourtant bien, et moi aussi d'ailleurs. Il nous expliquait la relation ambigüe de Moriarty (le bel ami de Jack Kérouac qui s'appelait dans la réalité Neil Cassidy) et de Kérouac lui-même dans cette quête de soi que représente ce roman. Il lui montrait comment Kérouac, bien que fondamentalement hétérosexuel, s'était laissé charmer par Moriarty (Cassidy) et comment il avait utilisé sa sexualité et ses désirs pour Moriarty comme une sorte de grammaire pour écrire son roman. Claude buvait ses paroles. Et moi aussi d'ailleurs. C'était si beau d'entendre Bertrand nous raconter tout cela et il était encore plus beau quand il parlait. Il devenait notre Moriarty. Et tels de nouveaux Kérouac, nous nous laissions porter par les désirs qu'il faisait sourdre en nous.
Pour moi, c'était une évidence : Bertrand n'avait qu'à bouger ou à se mettre à parler d'art, de littérature, de musique ou de quoi que ce soit d'autre, il me faisait bander. Il était si beau, si grand, si magnifique, si sexy quand il se mettait à raconter...à enseigner. Et si, en gesticulant, il bougeait un peu trop et que son odeur parvenait à mes narines, je ne pensais plus qu'à lui lécher les pieds et à lui sentir le cul. Je ne savais pas encore pour Claude mais pour moi c'était devenu un réflexe automatique.
Sans qu'il m'ait été possible de lire dans la pensée de mon compagnon de voyage, et pas davantage facile d'aller vérifier s'il y avait bien une bosse sur le devant de son pantalon marron (il portait au départ les mêmes vêtements que tous les jours), le regard qu'il posait sur Bertrand ne me paraissait pas aussi virginal que celui d'une Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus en prière, les yeux rivés sur une image sainte. Il y avait de la concupiscence dans le regard que Claude posait sur notre prof commun. Réchauffés par ce cours improvisé, ou savamment préparé, sur la Beat Generation, les propos de Claude confirmèrent qu'il reconnaissait l'importance d'être ouvert à ce que la Vie mettrait sur son chemin afin d'aller au bout de sa propre quête de liberté et de dépassement. « Sans qu'il soit nécessaire de vivre Une Saison en Enfer à la Rimbaud, On the Road offre une alternative intéressante et moins traumatisante à la nécessité d'une sorte de dérèglement des sens. » Wow! De telles paroles montraient que le cours de Bertrand portait ses fruits. Rassuré sur les intentions philosophiques de Claude qui se déclarait être prêt à vivre plus dangereusement sur le plan émotif, incluant la dimension sexuelle, il restait à mon beau et bon prof une autre étape à franchir : introduire dans la tête de Claude des images susceptibles de déclencher la mise en marche du projet mental. Car, autrement, il pourrait tout aussi bien le remettre à plus tard, à si tard, qu'il ne se réaliserait jamais et resterait une belle discussion de table par un beau soir de novembre à Manhattan.
Bertrand nous fit remarquer qu'il nous avait amené dîner McDougal Street, tout près du Café Picasso, haut-lieu de la Beat Generation; donc très fréquenté par Ginsberg et Kérouac où l'on irait d'ailleurs prendre un café après dîner.
Cette dernière remarque mit fin à mes doutes quant à savoir si un plan avait été préparé par Bertrand. Il y en avait bien un. Il restait à savoir, premièrement s'il avait été concocté dans les moindres détails ou seulement dans ses grandes lignes, et deuxièmement s'il avait des chances de succès auquel succès j'espérais bien être convié. Pendant que la « Roulette » continuait de tourner, que notre prof reprenait la conversation, je bandais de plus en plus en prévision que la Banque (Claude) allait sans doute sauter et, qu'avant l'aube, j'aurais les « jetons » de Claude dans la main. Depuis le temps que je voulais voir ce qu'il y avait dans ses fameux pantalons marron!
Pour mettre des épices dans la sauce, Bertrand nous parla ensuite de William Burroughs. Grand ami de Kérouac et de Ginsberg, Burroughs était de loin le plus excessif des trois. Si tous étaient de grands consommateurs d'alcool, de marijuana et de morphine obtenue chez des médecins peu scrupuleux, Burroughs était accroché aux drogues dures, comme l'héroïne, et il était amateur aussi de champignons magiques comme le peyolt. C'était là l'une des raisons pour laquelle il a vécu longtemps au Mexique où Kérouac était allé le rejoindre pour « tripper » temporairement avec lui. L'autre raison qui poussa Burroughs à vivre au Mexique, même s'il y vivait avec SA femme (?), c'était la proximité des jeunes garçons très « disponibles » à cette époque là. Il fréquentait un milieu de loubards qui lui fournissaient sa drogue, qui lui rendaient des services sexuels et qui vivaient avec lui, sous son toit, protégés des descentes policières. La drogue, la chaleur ambiante, l'intimité et l'odeur de tous ces voyous, les plats épicés sans doute et une très grande oisiveté plongeaient les petits compagnons de Burroughs dans des rêves et des activités érotiques de plus en plus morbides et sophistiquées. Il était comme Tibère dans sa Villa de Capri, vivant dans une sorte de débauche continue. Bertrand nous parla de son œuvre en général mais surtout de Naked Lunch, son plus grand succès littéraire. Bien que je ne sois pas intéressé vraiment par les jeunes garçons, et Claude non plus sans doute, les anecdotes croustillantes que Bertrand nous racontait de ce roman, avait tout de même un effet saisissant sur mon bas ventre. Claude semblait dans le même état que moi, du moins à en juger par son regard qui me paraissait plus pénétrant que d'habitude et par son souffle accéléré.
Bertrand savait ce qu'il faisait, je n'en avais plus aucun doute à présent. Les récits de Naked Lunch constituaient vraiment les « épices dans la sauce » comme je l'avais préalablement pressenti. Après dîner, tel qu'annoncé précédemment, on est allé prendre un café au Picasso. Puis, on a regardé les boutiques de Bleeker Street en allant vers l'ouest jusqu'à Christopher Street que l'on a remonté vers Greenwich Avenue. Christopher Street était encore, à cette époque, la rue gay importante de New York. Les commentaires de Bertrand et son aisance dans la rue laissaient voir et entendre clairement que, s'il n'était pas exclusivement gay, il ne dédaignait pas, à l'occasion, un bon morceau de mâle. Il nous invita à prendre un dernier verre au Boots and Saddles avant de sauter dans le métro pour rejoindre notre hôtel près de Times Square.
Parvenus à l'hôtel, Bertrand me regarda droit dans les yeux comme pour m'avertir de ne pas le contredire et il annonça qu'il dormirait seul dans un lit et nous dans l'autre. Ce n'était pas le plan initial, mais je ne détestais pas l'idée de me retrouver près de Claude durant la nuit. Comme ce dernier manifesta son intention de prendre une douche après cette journée passée assis dans la voiture et à déambuler dans New York, je n'ai pas osé lui dire que cela me priverait de bénéficier de ses odeurs naturelles. Je comprenais aussi que, sachant qu'il partagerait le lit avec moi, il croyait me rendre ainsi plus à l'aise. C'était vraiment une marque de gentillesse de sa part. Évidemment, il ne pouvait pas savoir que mes fantasmes auraient choisi, s'ils eussent pu le faire, une autre alternative que la douche.
Dès qu'il fût dans la salle de bain, où il s'était rendu seulement en slip, je me suis précipité vers son fameux pantalon marron en velours côtelé et j'en ai sniffé l'intérieur sous le regard amusé de Bertrand. Tout en me laissant me caresser le sexe et vivre mon fantasme, il me mit au fait de ses dernières manœuvres pour faire succomber Claude et il me pria de suivre ses consignes sans discussion. On n'avait pas le temps d'en débattre de toute manière, le temps d'une douche étant relativement court. Il a rapidement commandé un film bisexuel à la télé et on s'est empressé de se dévêtir et de s'allonger, chacun sur son lit (moi sur celui que j'allais partager avec Claude). Ne gardant que nos « bobettes », la tête appuyée sur des oreillers et faisant semblant d'être excité par le film, on se caressait lentement le sexe. Le mien était déjà bandé dur depuis que j'avais sniffé le fond de culotte abondamment chargé de l'odeur du cul du beau Claude. De plus, l'odeur « enchanteresse » du corps de Bertrand dévêtu dans la chambre entretenait l'effet. Tout cela se mit en place rapidement, sans discussion, comme Bertrand, maître des consignes, me l'avait signifié.
Quand Claude est sorti de la salle de bain, une serviette entourant sa taille et son slip dans une main, il figea devant le spectacle que nous lui offrions, si savamment préparé. Les lampes étaient éteintes mais les lumières de Manhattan entraient suffisamment dans la chambre pour qu'on y vît très clairement. Le point lumineux provenant de l'écran du téléviseur créait une étrange atmosphère comme une zone crépusculaire (Twilight Zone). Comme Bertrand et moi avions commencé à nous caresser la bite par-dessus nos slips, tout en fixant la télé, Claude vint s'allonger silencieusement à côté de moi après un moment d'hésitation. Il se coucha cependant complètement et se tourna du côté qui nous était complètement opposé faisant mine de vouloir s'endormir en nous abandonnant à nos «juvéniles et vulgaires activités ». Je l'entendais presque penser. Du moins, ses gestes pouvaient-ils nous laisser croire à de telles pensées. Mais la timidité pouvait aussi contredire tout cela.
Bertrand m'a dit, assez fort pour être bien entendu de Claude : « Enlève ton slip, Alex et branle-toi avec moi! Faut se défaire du stress de la route! J'entendais aussi de celui d'On the Road! Paraît-il qu'il n'y a rien de mieux qu'une bonne branle. » Claude ne bougeait pas. J'ai enlevé mon slip en faisant du bruit et j'ai attrapé ma queue en la faisant claquer dans ma main. Après quelques minutes de masturbation, je me suis retourné vers Claude et je lui ai dit doucement : « Ce n'est pas possible qu'on ne réveille pas la « bête » en toi, Claude. Je suis sûr que tu es bandé. Il ne faut pas être gêné entre compagnons de voyage. Ginsberg, Kérouac et Burroughs, ça peut être nous aussi si on le veut bien! » Lentement, très lentement, j'ai avancé ma main sur sa cuisse. Il n'a pas bougé. Puis j'ai osé, sur un signe de Bertrand, remonter la main sous sa serviette et atteindre sa queue qui était toute raide et dure; c'était bon signe. J'ai caressé un peu ses couilles et je l'ai lentement masturbé sous la serviette. Il avait une magnifique queue. Elle était longue et plutôt mince mais parfaitement sculptée; une œuvre d'art en somme. Il fallait que je voie cela de plus près. J'ai défait le nœud de sa serviette et j'en ai rabattu les pans sur le côté. J'ai donné encore quelques bons coups de branlette à sa queue puis, je lui ai glissé à l'oreille, du ton le plus chaud et sensuel que mon registre de voix pouvait me le permettre : « Bertrand et moi, nous allons nous crosser ensemble et on a envie que tu le fasses avec nous. Je suis sûr que toi aussi tu en as envie. Ta queue répond pour toi. Alors? Viens Claude! » Je prenais le risque qu'il se réfugie dans les toilettes. Mais il a dû songer à l'atmosphère intolérable qui régnerait entre nous le reste du voyage s'il se sauvait ainsi pour nous fuir. Sans doute aussi le discours de Bertrand sur la Beat Generation, sur Burroughs et sa sexualité débridée, son propre discours sur l'abandon à ce que la vie place sur notre chemin, la situation également très excitante avec Bertrand, son héros, et moi qui n'était pas laid du tout...tout cela a pesé lourd et il s'est retourné lentement vers nous comme quelqu'un qui s'éveille après une longue nuit de sommeil. Il s'étira et se redressa pour s'installer finalement comme nous, le dos appuyé sur des oreillers contre la tête de lit juste à côté de moi. Il a attrapé sa queue avec sa main gauche, on se cognait parfois les coudes car je suis droitier, et il s'est masturbé avec nous. Il regardait de temps en temps la télé pour la forme, mais il regardait plutôt le mouvement de nos mains sur nos queues respectives. Nous non plus on ne se gênait pas pour l'examiner. Il le voyait bien et il semblait de plus en plus apprécier son rôle d'exhibitionniste improvisé.
Soudain, Bertrand a quitté son lit et il nous a rejoints. Il a emporté avec lui deux oreillers qu'il a installé au pied du lit pour se retrouver en face de nous. C'était une sorte de « Circle Jerk », comme on dit aux États-Unis. On était gêné tous les trois mais la gêne nous excitait davantage. C'est Bertrand qui en fit la remarque, ce qui contribua à nous gêner davantage...donc à nous exciter davantage.
À un moment donné, je me suis penché, j'ai déplacé délicatement la main de Claude et j'ai engouffré son pénis dans la bouche. Je l'ai sucé comme je voulais qu'il ne l'oublie plus jamais. Je léchais sa queue de haut en bas et en sens contraire. Je mordillais le frein. Je chatouillais le méat avec la pointe de ma langue et je passais ma langue sur ses couilles. Je pompais sa bite comme un piston de moteur. Il soufflait de plaisir.
Bertrand s'est allongé sur le côté et nous avons fait un 69 à trois; moi je prenais Claude, Bertrand me prenait et on a laissé à Claude le plaisir de découvrir la belle et grosse queue de son prof dont il avait sûrement rêvé, autant que je l'avais fait moi-même, dans le silence de sa chambre, la main dans son froc.
Relevant une jambe de Claude, j'ai atteint son cul qui sentait bien sûr le savon de douche. Mais, se distinguait encore, au fond des poils noirs et raides, un mystérieux parfum d'épices vieilles et un peu rances comme cette fragrance de girofle mêlée à de la pollution atmosphérique que l'on distingue entre toutes quand on descend d'avion dans un aéroport d'Indonésie.
Quand j'ai commencé à lécher son cul, Claude s'est littéralement mis à gémir. Je lui ai même demandé s'il voulait que j'arrête car je ne comprenais pas clairement si cela lui plaisait ou s'il s'y soumettait par une sorte de crainte à me repousser. Quand il a murmuré : « Continue! Lâches-moi pas! C'est tellement bon! », je savais que je pouvais pousser ma langue le plus loin possible et que je le mènerais à l'orgasme. Ma langue dans son cul, une main affairée à lui masser les couilles et l'autre le masturbant, Claude a craché son jus en émettant un cri profond, sauvage, primal. J'avais la certitude que c'était sa première relation sexuelle avec une personne autre que lui-même. Plus tard durant l'année, il me le confirma.
Bertrand et moi avons laissé Claude reprendre ses forces pendant qu'on achevait de se masturber l'un l'autre. La chambre sentait le sperme, le cul et les pieds de Bertrand, sans doute aussi les miens que je ne sentais plus par habitude, et un peu le savon de douche. Cependant, traînait encore dans mes narines l'odeur forte et acide du fond des pantalons marron de Claude. Pour un premier soir de voyage, c'était plutôt réussi et Bertrand était un grand maître de la Bate Generation autant que de la Beat Generation.
...
Le lendemain matin, c'était une journée plutôt froide de fin d'automne, mais le soleil était au rendez-vous. Comme on avait dormi sans tirer les tentures, c'est la lumière du jour qui nous a réveillés presque au même moment. Claude s'était collé contre moi au cours de la nuit et je sentais sa queue toute bandée contre mes reins. Je n'ai pas bougé pour qu'il ne pense pas que je voulais le repousser. Mais quand il a ramené son bras par-dessus ma taille pour attraper mon pénis et vérifier son état, alors je lui ai montré que son message était reçu. Je me suis retourné face à lui. Il m'a fait un beau sourire, certainement difficile à réaliser pour lui car, non seulement était-il un beau ténébreux à l'air un peu triste et tourmenté auquel le sourire ne collait pas, mais il avait une petite bouche et des lèvres plutôt minces qui donnaient à son exercice une allure tout à fait inadaptée. Sourire ne convenait pas à son style. C'est pourquoi ce sourire là, ce matin-là, devait sans doute venir du fond de son cœur. Je le lui ai rendu le plus largement possible et j'ai approché mes lèvres pour l'embrasser. En avançant la bouche, j'ai senti une certaine peur, un léger recul, puis, en fermant les yeux, il s'est abandonné complètement et nos lèvres se sont rencontrées pour une première fois. En s'entrouvrant, nos bouches ont permis à nos langues de faire le reste comme de vraies professionnelles. Nos mains ont tout naturellement glissé vers nos queues toutes bandées et on a commencé à se masturber lentement, face à face et réciproquement. Bertrand, réveillé comme nous par la clarté du jour, se rendit compte qu'on avait débuté la journée sans l'attendre. Mais il n'en prit pas du tout ombrage. En bon voyeur, il nous a laissé nous enfoncer plus avant dans notre action tout en nous observant. Il a fini par se lever et venir se placer sur notre lit pour mieux voir et se branler tout seul devant le show, cependant plutôt discret, qu'on lui donnait. On a joui presque tous les trois en même temps. Bertrand a propulsé son jet sur nos hanches et notre poitrine. Avec une main, j'ai ramassé et mêlé les trois semences sur mon ventre jusqu'à les confondre complètement et j'ai porté à mes lèvres une bonne lippée de mon heureux mélange. Bertrand s'est avancé pour en cueillir une bonne lippée qu'il a aussitôt avalée. Lui et moi avons regardé dans la direction de Claude qui, timidement, a tendu la main pour venir chercher sur mon ventre une quantité tout de même assez substantielle de ma préparation et il la porter à son tour à ses lèvres.
Quand tout le « breuvage », du moins une bonne partie, fut consommé, Bertrand a conclu sur un ton assez sarcastique : « On est uni maintenant tous les trois, pour le meilleur et pour le pire » comme pour nous avertir que la party ne faisait que commencer. « J'espère bien, dis-je, qu'on va pousser plus loin le « dérèglement de nos sens » sans passer pour autant une Saison en Enfer, n'est-ce pas Claude? » Il savait très bien que je faisais allusion à ses propos de la veille et que, s'il ne voulait pas se contredire, il allait désormais devoir accepter de vivre avec nous d'autres expériences. « Je vous suis, les gars. » a-t-il fini par dire en guise de conclusion.
Alors, sur un ton solennel, mais qui n'avait de solennel que la forme, Bertrand nous annonça, sourire aux lèvres : « Le programme de notre séjour à New York sera donc le suivant, mes amis : musées, promenades historico-romantiques des écrivains, un peu de shopping... _ il fit une pause stratégique_ et shopping pour se procurer de l'herbe et des gadgets pour plus tard dans la nuit ». Claude a blêmi et j'ai senti qu'il a redit encore une fois dans sa tête la réplique de Molière: « Mais que diable suis-je venu faire dans cette galère? » Devant son air étonné, j'ai poursuivi en disant : « Si je comprends bien ce que vient de nous dire Bertrand, tu l'auras peut-être après tout, mon cher Claude, ta Saison en Enfer! » Et je me suis mis à rire, suivi par Bertrand...suivi par Claude avec un certain retard.
À suivre : Une fin d'après-midi grise à Manhattan Alexandre