La Muse

Published on Dec 16, 2024

Gay

La Muse Chapter 5

LA MUSE

Chapitre 5

Par David Inutookaminoma

Le soir chantait aux portes de la journée sur laquelle le soleil étendait lentement ses longs rayons rougeâtres.

Soan, assis sur le bord de la piscine, les jambes à moitié immergées, écoutait le requiem K626 de Mozart, œuvre inachevée à sa mort, qui flottait autour de lui depuis l’enceinte à laquelle Meike avait connecté son smartphone. Que le jeune Allemand appréciât ce genre de musique fut une découverte.

Meike, nu, allongé sur une serviette, avait fermé les yeux depuis un moment. L’iris de Soan ne cessait d’aller et venir sur ce corps serein. Son esprit, vil et lubrique, lui rejouait les nus de Meike : son fessier ferme, son dos sous la douche, son abdomen. Lorsqu’il sentit que cela commençait à provoquer une érection, il glissa dans l’eau.

A cette seconde, Meike releva le buste et prit appui sur les coudes. Il regarda Soan en train de nager une brasse tranquille. Il se leva et sauta dans le bassin.

Soan s’immobilisa, semblant marquer une certaine distance avec le mannequin qui le fixait dans les yeux.

“Tu as un petit copain ?” lui demanda-t-il.

“Non…”

“Un garçon comme toi n’a pas de petit copain : comment est-ce possible ?”

“J’ai des dates, Meike. Mais pas de petit ami.”

“As-tu déjà été amoureux ?” questionna encore Meike en s’approchant.

“En quoi cela intéresse-t-il le modèle que je dois photographier ?”

“Je ne sais pas : je suis mon instinct.”

Soan sourit puis interdit à son regard de plonger vers le bas-ventre de Meike qui s’approchait encore.

“J’ai eu une histoire avec un mec pendant trois ans. Il m’a trompé ; je l’ai trompé pour me venger. On a commencé à se détester. On s’est fait du mal. Je ne suis pas très fier de cette période.”

Sous le regard de Meike, Soan s’enfonça dans l’eau et nagea un peu plus loin.

“J’imagine que tu n’es pas pressé de remettre ça.”

“Tu as tout compris.”

“Tous les mecs ne sont pas infidèles.”

“Veux-tu me parler de ton ami qui te pose des lapins ?”

“Tu es le premier à m’avoir ouvert les yeux sur le fait qu’il me manquait de respect. Je crois que tu as raison. J’ai manqué de respect envers moi-même.”

“Au moins, tu l’as compris. Maintenant, tu peux passer à autre chose. Tu l’aimes ?”

Meike chercha des mots au fond de l’eau. Il en attrapa quelques-uns qui tentaient de filer.

“Un peu. Je pense que c’est plus qu’une simple affection.”

“Je te propose qu’on aille chasser un peu demain soir !”

“Pourquoi chasser ?”, marmonna Meike.

“Pardon ?”

“Je dis : pourquoi pas ?”

“Si tu veux inviter un date ici, tu as ma bénédiction.”

“Je ne vais pas faire ça, non. Je suis chez ta grand-mère !”

“Ce qu’elle ignore ne peut pas la tuer.”

Ils rirent. Puis sous le regard rapace de Meike, Soan sortit du bassin et se dressa sur ses jambes. Pas de doute, elles étaient bien sculptées par des années de Taekwondo.

“J’ai sommeil”, dit Soan, “je vais me coucher.”

“Je peux venir ?”

Soan, bouche ouverte, surpris par la question, arrosa Meike de silence.

“Meike, ferme la !”

L’Allemand rit de bon cœur en regardant Soan s’éloigner. Il sentit son pénis se dresser. Il le prit dans sa main avant de se rendre compte que Soan revenait sur ses pas. Il se colla au bord afin d’interdire à son hôte de le surprendre dans un tel état.

“Demain matin, viendrais-tu avec moi courir un 6 miles ?”

“Bien évidemment !”

“On se lancera dans le shooting après.”

“Encore merci, Soan.”

“De rien.”

Puis Soan, sur le point de repartir, se freina :

“Et arrête de me draguer !”

“Pourquoi : je ne suis pas ton type ?”

“Ce n’est pas le sujet. Je suis ton photographe et je veux rester concentré sur mon objectif.”

“Oui, tu veux rester concentré sur moi !”

Soan, hochant la tête de gauche à droite, lui adressa un majeur dressé, puis se retira tandis que Meike riait aux éclats. Une de ses mains replongea dans l’eau.

Soan sortait son matériel qu’il préparait au travail et déposait sur le lit de la chambre où les vêtements étaient exposés. Il inséra une carte mémoire dans son appareil photo à la seconde où on toqua à la porte.

A l’aise, Meike apparut en boxer et débardeur blancs. Son “paquet” obligea Soan à  décrocher très vite ces yeux de lui. Mais, pour son travail, il devait pourtant le regarder. Il se leva du lit où il était assis, marcha vers Meike, inspecta ses cheveux, à la recherche d’un épi rebelle. Il leva un pouce.

“On dirait le Ken de Barbie.”

“Je ne sais pas comment je dois le prendre”, rétorqua Meike qui passa son chemin pour se rendre devant la penderie. “On commence par le Boss ?”

“Vas-y !”

Sans hésiter, Meike se déshabilla entièrement. Soan baissa les yeux et inspira discrètement. Quand il les rouvrit, Meike enfilait un des Jockstraps offerts par la marque. Il se tourna face à Soan, fier :

“Alors ?”

Pour toute réponse, Soan le photographia. Meike lui tourna le dos, les lèvres pincées et le visage un tantinet malicieux. Soan soupira lentement. Clic !

“Est-ce que ça te plait ?” demanda Meike en lui faisant à nouveau face.

“Beaucoup.”

“On commence par le costume complet ?”

“Oui”, répondit Soan qui plaça son appareil en bandoulière avant de rejoindre Meike à l’habillage. Il l’aida à enfiler la chemise à manches longues et col Kent qui seyait parfaitement au mannequin. Il éprouva bien du mal à éviter le regard de ce dernier. Pantalon, ceinture en cuir grainé, derbies à lacets en cuir nappa : tout se mariait impeccablement à Meike.

“C’est vraiment cool, tu sais”, dit celui-ci, “Je n’ai pas assez de mots pour te remercier.”

“Sais-tu nouer une cravate ?”

La grimace de Meike déclencha un bref éclat de rire chez Soan, lequel s’empara d’une cravate en jacquard noire. Il la passa autour de son propre cou. Sous le regard attentif et amusé de Meike, il prépara un nœud harmonieux. D’un geste lent, il ôté la cravate nouée avant de la tendre à Meike. Il prit le relai de ce dernier pour ajuster correctement le col de la chemise, réalisant une fois encore que son jeune partenaire ne cessait de le regarder. Trouvait-il cela vraiment désagréable ? Enfin, il l’accompagna pour enfiler la veste du costume. D’un pas il recula et scruta le jeune mannequin.

“Tu es à tomber par terre !”

“Merci, c’est gentil.”

Soan désigna un miroir sur pied dans la pièce ; Meike se posta devant et sourit.

“J’adore. On va où pour les photos ?”

“Meike, fais-moi plaisir : tes idées m’intéressent. Donc n’hésite pas à dire si tu veux qu’on fasse quelque chose dont tu as envie.”

“Genre, te rouler un patin ?”

Soan vit tout le visage de son invité esquisser un ricanement. Meike ne détecta aucun signe de réprobation chez Soan.

“Meike, je vais te botter le cul !”

Sous l’impulsion du photographe, Meike rejoignit le balcon de la chambre, baigné de soleil. Pratiquement au garde-à-vous, Meike fixa intensément l’objectif de l’appareil qui l’immortalisait.

“Maintenant, imagine que tu visites cet endroit pour la première fois… Tu viens d’arriver…”

Les clics se succédèrent. Soan contrôlait chaque prise.

“Est-ce que ça te plait ?”

“Tu es vraiment fait pour ça. Tu es tellement impeccable dans cette tenue. Elle te va très bien. Un vrai gentleman !”

Puis, Meike retira la veste. Soan, qui avait repéré ses tétons pointus, le figea en chemise.

“Maintenant, tu vas retirer la chemise et remettre la veste à même la peau.”

Ainsi, l’après-midi productif amena de nombreux clichés de Meike dans la mémoire informatique : dans les costumes et blazers avec ou sans veste, avec et sans chemise, dans des T-shirts griffés, puis torse nu dans des jeans de grandes marques. Quand ce fut l’heure de l’ultime cliché, Soan souhaita que Meike portât à nouveau un des costumes sans chemise. Dans le doute, Meike hésita puis enfila celui de CK, sa marque préférée. Le blazer slim noir épousa ses formes avec une élégance redoutable.

Pendant qu’il se préparait, Soan s’était absenté et était revenu de la salle de bain avec une petite bassin d’eau, de la cire de coiffage et une serviette. Il vint se ficher bien droit face au mannequin qui fronça le sourcil. Il passa ses mains dans les cheveux de Meike, prenant un soin remarquable à foutre le bordel dans sa coiffure impeccable. Les lèvres de Meike s’animèrent d’un sourire plein de charme.

Puis Soan prit une bonne noisette de cire dans sa paume, frotta ses mains entre elles et tartina les cheveux châtains de Meike, appliquant à la sauvagerie de sa nouvelle coiffure, un peu de tenue.

“Meike, parmi les chansons que tu préfères, quelle est celle sur laquelle tu aimes chanter et danser en même temps ? Celle qui t’éclate !”

“Tainted love”, répondit Meike.

“Alors voilà ce que je veux : tu vas lancer la lecture de ce titre à fond dans l’enceinte. Et je veux que tu t’éclates, que tu chantes. On va descendre ; montre-moi comme tu es heureux, jeune et dingue !”

Enthousiaste, un grand sourire dans les yeux, Meike lança la lecture du titre depuis son smartphone. Aussitôt, son corps sembla rebondir, traversé par le rythme qui cognait les murs de la villa. Emporté par un tourbillon de joie invisible, il tourna sur lui-même, les bras levés, se mit à chanter tout en remuant son popotin.

Clic ! Clic ! Clic ! Soan multipliait les prises en suivant son jeune talent dans le couloir, qui se dirigea vers l’escalier. Il en débuta la descente ; Soan le photographia depuis le palier : Meike leva les yeux, sourit comme un ange aux anges, dansant, chantant à tue-tête. Sur une marche, il sautilla en rythme, les bras suspendus puis tapa dans les mains en se tortillant. Soan commença à son tour à descendre les marches.

Meike reprit sa progression chahutante vers le rez-de-chaussée. Il paraissait évoluer au beau milieu d’une magistrale fête. Pris dans son élan, il dénuda ses épaules et tourna sur lui-même. Clic ! Finalement, il s’en débarrassa sur le canapé, poursuivant torse nu vers la terrasse. Il exécuta une danse féline, faisant courir ses mains le long de ses cuisses, de ses hanches puis dans son cou. Clic, clic, clic ! Il s’immobilisa quand la chanson en version longue prit fin. Soan le regardait sans bouger. Au fil des secondes qui s’égrainaient, il redevint sérieux, reprenant son souffle avec aisance.

Soan ravala sa salive. La peau de Meike suintait discrètement sous l’effet de la chaleur et de son dynamisme. Quelle saveur avait sa sueur ? Il baissa les yeux, expira et reprit le contrôle de ses idées :

“Les cheveux en pétard t’apportent un charme fou, une jeunesse et une folie qui te rendent irrésistible. C’est une facette de toi que tu dois mettre en avant.”

“Irrésistible…” marmonna Meike.

Il n’y avait pas d’autre mot.

En compagnie du photographe, Meike, torse nu, assis juste à sa gauche, faisait défiler sur l’écran l’ensemble des clichés.

“Alors, qu’en penses-tu ?” interrogea Soan.

“Eh bien, je pense que ça déchire !”, s’émut le mannequin. “Je me suis senti bien tout l’après-midi. J’étais dans mon élément”.

“C’est ce que j’ai vu. Il faut que tu t’accroches parce que tu es vraiment fait pour ça.”

“Merci !”

L’Allemand déposa aussitôt une bise sur sa joue, avant de se lever pour marcher en rond.

“Qu’est-ce qui t’arrive ?”

“Tu savais ce que tu faisais en m’invitant ici, n’est-ce pas ?”

“J’ai juste suivi mon instinct…”

“Je vais te rouler un patin !”

Soan poussa un rire en ouvrant une application de messagerie sur son ordinateur portable. Lorsqu'il se retourna vers Meike, il vit une traînée d'eau couler sur l'une de ses joues. Il ne trouva pas un mot.

"Puis-je aller nager, patron ?"

"Oui ! Je te rejoins !"

"On sort toujours ensemble ?"

"Qu'est-ce que tu en penses ?"

"Je te suivrai quoi que tu fasses."

(à suivre)


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